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10-1. L’âme peut-elle embrasser l’Un et ne plus Le quitter ?


Pourquoi le concept de l’Un est si difficile à envisager. Pourquoi corps et esprit ne méritent pas leur distinction.

 

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zài yíng pò bào y? néng wú lí h? ?

Partout avec – Diriger/Protéger – Âme – Embrasser – L’Unité – Pouvoir – [Négation] – Quitter – [Interrogation]

 

?(?) [zài] signifie porter, transporter, charger, partout avec, aussi bien que, au même moment ou simultanément. Prononcé [z?i], il signifie année, mettre par écrit ou enregistrer. ?(?) [yíng] signifie chercher, faire fonctionner, gérer, diriger, protéger, campement ou battalion (d’armée). Dans certaines versions, ce caractère a été remplacé par [hun], traduit par le Maître du Bord du Fleuve en « âme visionnaire », en opposition avec le caractère suivant, traduit par « âme végétative ». ?[pò] signifie âme, vigeur ou énergie. ?[bào] signifie porter (dans ses bras), embracer, étreindre, chérir ou adopter (un enfant).  ? [y?] signifie un, seul, tout seul ou chacun mais aussi – et il est important de le souligner – entier, entier, tout, partout ou entièrement. ? [néng]signifie abilité, capabilité, talent, énergie, être capable de ou pouvoir, Cf. 7-2. ? (?) [lí] signifie quitter, partir, sans, indépendant de, au loin ou absent.  ? [h?] est une particule interrogative pour exprimer le doute ou la surprise, Cf. 5-3.

 

Trad.1 :

Ton âme peut-elle embrasser l’unité/l’un sans jamais s’en détacher, former avec lui un tout indissoluble ? / Peux-tu former ton âme de façon qu’elle embrasse l’Un ?

?  « Peux-tu faire à ton âme embrasser l’Un, dans une union indissoluble ? » (François Huang et Pierre Leyris)

?  « Peux-tu détourner ton esprit de ses errances et rester dans l’unicité originelle ? » (Stéphen Mitchell)

? Est-il possible à l’esprit de concevoir l’Unité ou bien la notion d’esprit crée-t-elle déjà le « deux » ? Concept d’unicité cosmologique.

 

Trad.2 :

Peut-on par l’âme du corps embrasser l’âme de l’esprit et concevoir l’unité ? / Si ton esprit et ton corps sont en harmonie, en unité, peux-tu jamais perdre ton unité, obtenir qu’elles ne se séparent pas ? / Peut-on unifier l’esprit et l’âme sans les laisser se détacher l’un de l’autre ? / En te cramponnant avec ton âme spirituelle et ton âme corporelle à l’unité, peux-tu empêcher qu’elles se séparent ?

? Est-il possible de se retrouver uni en Soi ?  Concept d’unicité personnel.

 

 

 

Contre-sens ? 

Oublier le caractère interrogatif? et ainsi affirmer « tu peux alors ne plus La quitter » est bien la moindre des erreurs dans cette phrase aux sens multiples voire contradictoires. La problématique majeure de la plupart des traductions concerne la mise en opposition de l’âme spirituel avec une âme sensitive/charnelle/spermatique, voire une opposition entre l’esprit et le corps, le summum étant atteint par Stanislas Julien avec son « L’âme spirituelle doit commander à l’âme sensitive. Si l’homme conserve l’unité, elles pourront rester indissolubles. » Au final, seules six traductions semblent respecter les caractères (François Huang et Pierre Leyris, Liou Kia-hway, Jean Levi, Rémi Mathieu, Catherine Despeux et Richard Wilhelm), ce qui ne signifie pas pour autant que le sens soit juste, tant cette phrase demeure mystérieuse. Comme le dit Jean Lévi dans son avertissement « on pourrait imaginer le rapport entre la traduction et l’original sous les espèces de la relation entre l’unicité du Tao et la multiplicité des êtres manifestés. L’Un est un comme virtualité indifférenciée et support de toute existence, mais il est infini dans ses manifestations concrètes. » (Le Lao-Tseu, p.52)

 

? L’âme peut-elle embrasser l’Un et ne plus Le quitter ?

Au moment même où tu cherches à ce que ton âme embrace l’Unité, comment ne pas la quitter ?

 

Réflexions :

1. L’esprit tourne autour de l’ego et l’ego crée nécessairement la différenciation et donc les antagonismes. Voilà pourquoi il convient de « vider son esprit », Cf. 3-5.

2. « L’homme doit harmoniser l’esprit et le corps » a dit Hippocrate. La vision occidentale dualiste – esprit d’un côté et matière de l’autre – entretenue par nos philosophes d’Aristote à Descartes, a joué un rôle prépondérant dans le mal-être et la solitude de l’homme moderne, tout en nous déconnectant du Tao.

3. En médecine allopathique, ce paradigme – corps d’un côté et esprit de l’autre – retarde la guérison et favorise le développement des pathologies, d’où le succès des thérapies naturelles qui unifient et traitent l’ensemble de l’organisme. Sur les absurdités de cette dichotomie, écouter l’émission corrosive « A votre écoute coûte que coûte » sur France Inter à 12h20 : « L’esprit, c’est elle. Le corps, c’est lui ! ».

4. « Le fameux adage cartésien cogito ergo sum, « je pense donc je suis »,  a conduit l’homme occidental à s’identifier à sa concience, au lieu de considérer l’ensemble de son organisme. […] Séparée du corps, la conscience se voit investie de la mission illusoire de le contrôler, causant ainsi un conflit apparent entre la volonté consciente et les instincts inconscients […] de là des conflits sans fin générateurs de confusion métaphysique et de frustration. Cette fragmentation de l’homme reflète sa vision du monde « extérieur », perçu comme une multitude d’événements et d’objets séparés […] Une telle croyance nous a éloignés de la nature et de nos semblables. » (Fritjof Capra, p.23)

5. Se réconcilier avec son corps et accepter ses imperfections pourrait-être la première étape d’une unicité assumée. Je ne suis pas distinct de mes instincs. Je ne suis pas fautif de mon imperfection. Ce sont eux, c’est elle, qui me caractérisent au contraire comme un être humain. Je suis un Tout constitué du meilleur comme du pire.

 

Le Mendiant

 





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